Politique-fiction : 2308, Ch’Nord, première puissance mondiale
Nous sommes en 2308. Rappel historique :
Le Nord-Pas-de-Calais est déjà depuis au moins 2286 dans un état de quasi-indépendance qu’il a lui-même voulu, reprochant aux autres régions françaises de lui prendre ses ressources. Le Nord est jalousé, haï, mais il sert aussi de modèle pour le reste du monde avec son « mote ed vie des chtimis » et " sin rêf chtimi".
La langue dominante au niveau mondial est bien entendu devenue le chti. Même si elle n’est en 2308 la langue maternelle que de 8 millions de personnes, essentiellement en Europe occidentale, elle est en progression fulgurante – il suffit de penser au quelques centaines de milliers de personnes qui parlaient cette langue au début du 21e siècle – et est parlée désormais par deux milliards d’être humain au moins comme langue seconde, ce qui représente environ 70% de ce qui reste de la population mondiale suite aux nombreuses catastrophes écologiques.
Le monde, depuis les années 2000, a bien changé. Ce pays que l’on appelait auparavant les Etats-Unis n’est plus la première puissance mondiale. Les premières sécheresses ont poussé les gens à aller vivre quasi exclusivement sur les côtes. Les tremblements de terre et les raz-de-marée ont – si j’ose dire – achevé le travail.
En revanche les Chtimis avaient préparé le terrain et ont donc su contrer les effets néfastes des bouleversements climatiques spécifiques aux régions côtières. Ils ont ensuite profité de la richesse qu’apporte la proximité d’une mer, après que les raz-de-marée ont diminué d’intensité. L’avantage spécifique du Nord-Pas-de-Calais a donc été d’être prévoyant, d’être proche de la mer sans pour autant être une île et d’avoir su profiter de ses acquis en exploitant sans vergogne les régions limitrophes et au-delà.
Pour prévenir les raz-de-marée, la région Nord-Pas-de-Calais a installé des murs de plusieurs centaines de mètres sur les côtes en se servant des briques rouges des usines désaffectées et les restes de charbon des terrils. Seuls quelques passages côtiers ont été laissés pour le transport maritime et à ces endroits les populations ont été déplacées pour être relogées plus loin des côtes ou dans des zones protégées par les murs de briques rouges et de charbon. Cette initiative a eu un premier effet positif : elle a résolu le problème du chômage en créant de nombreux emplois dans la construction de ces murs, qui ont par ailleurs relancé de nombreux autres secteurs de l’activité économique, comme dans le domaine de la production de la bière, de la chicorée et de la cassonade de synthèse qui servaient à nourrir les ouvriers et leurs familles.
Le Nord-Pas-de-Calais a alors commencé à connaître une vague d’immigration, salutaire du point de vue économique car la main d’œuvre finissait même par manquer. De nombreux Américains, Suisses, Allemands, et les plus intelligents des Tourangeaux, ceux qui ont réussi à trouver la route du Nord sans se noyer, ont ainsi émigré. Puis la situation économique s’est stabilisée et même légèrement détériorée suite aux deux chocs charbonniers. Le Nord est toujours riche mais rejette désormais ses immigrés.
Petit à petit, les standards de vie et culturelle du Nord-Pas-de-Calais se sont imposés. Le patois évolue rapidement et devient une langue à part entière qui est impossible à comprendre à partir du seul français. Le chti devient une langue de prestige mais aussi une langue qui semble prétentieuse. Manger les voyelles est du dernier chic. Une véritable littérature s’est mise en place avec de nouveaux auteurs de la région. Par la suite, des auteurs d’autres régions ont commencé à écrire en chti. Ainsi ont émergé des auteurs devenus classiques comme Chtikchpire, avec sa pièce de théâtre devenu culte « Ch’Robert et Ch’Françoise » qui devient le symbole du couple amoureux tragique, ou comme Stindol et son roman « Eul rouche des briques et ch’noir des terrils », qui raconte le parcours de Juliin Chorel, personnage aux hautes aspirations sociales, tourmenté entre son désir de devenir maçon et celui de devenir mineur.
Le Nord-Pas-de-Calais a sa propre armée – avec ses armes de destruction massive préservant la couche d’ozone - et son propre gouvernement écolo-impérialiste. Mais n’étant pas non plus tout puissant, il n’a pas encore réussi à se dégager complètement des exigences résultant de son appartenance à ce que l’on appelle officiellement L’Union fédérale des régions de France – que l’on continue d’appeler la France dans le langage courant. La division s’est faite en trois régions : La République du Nord-Pas-de-Calais (RNPDC), la Fédération des Villes Libres du Bassin Parisien (FVLBP) et la Confédération du Tiers-Monde français (CTMF). Dans le langage courant, ces trois régions, qui possèdent chacune leur constitution et leurs lois, sont nommées respectivement « Ch’Nord » (même par les non Nordistes), « Paris » et « Le Reste ».
De savants investissements ont aussi permis au Nord d’obtenir la place qu’il a conquis. Cette République a pu partir à l’assaut des nouvelles technologies et de l’innovation. Elle a investi et racheté peu à peu les grandes entreprises américaines et japonaises, a entrepris unilatéralement de détruire l’industrie polluante de l’automobile en envoyant sur un maximum d’usines automobiles des bombes atomico-biologiques (avec des déflagrations de défécation, de vomi et de yaourt pourri qui rendent l’air irrespirable et donc le travail impossible dans ces usines).
(à suivre)